L’absence de mesures suffisantes ou efficaces prises par un employeur en vue de prévenir le risque d’agression auquel est soumis son personnel constitue une faute inexcusable. Peu importe que le risque vienne d’un tiers.
Tel est le rappel que vient d’effectuer la Cour de cassation.
Dans cette affaire, une médecin salariée, rentrée dans l’espace ambulatoire des urgences, avait été victime d’une agression physique prise en charge au titre de la législation professionnelle par la caisse primaire d’assurance maladie. Elle avait alors saisi la justice afin que soit reconnue la faute inexcusable de l’employeur.
Pour sa défense, l’employeur soutenait que, du fait qu’il émanait d’un tiers (en l’occurrence d’une patiente de l’hôpital), le risque était inévitable et qu’à ce titre sa réalisation ne saurait démontrer le caractère insuffisant des mesures de prévention mises en œuvre par ses soins. En vain.
Saisie du litige, la Cour de cassation rappelle qu’« il résulte des articles L. 452-1 du Code de la sécurité sociale et L. 4121-1 et L. 4121-2 du Code du travail que le manquement à l’obligation légale de sécurité et de protection de la santé à laquelle l’employeur est tenu envers le travailleur a le caractère d’une faute inexcusable lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était soumis le travailleur et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver ».
Dès lors, la demande de la salariée doit être accueillie puisque :
- D’une part, l’employeur ne pouvait ignorer le risque d’agression encouru par son personnel soignant, la recrudescence d’actes violents au sein du service des urgences de l’hôpital ayant été évoquée dès 2015, en raison, notamment, de l’engorgement des services générant l’insatisfaction des usagers, l’altération des conditions de travail et la dégradation de la qualité des soins ;
- D’autre part, les mesures de protection mises en œuvre par l’employeur étaient insuffisantes ou inefficaces à prévenir le risque d’agression auquel était soumis son personnel car le recrutement d’un agent de sécurité et la fermeture de la zone de soins par des portes coulissantes, qui lui avaient été demandés par certains salariés pour sécuriser les locaux, sont postérieurs à l’accident du travail.
Il ressort ainsi de cette analyse que le manquement à l’obligation légale de sécurité et de protection de la santé, à laquelle l’employeur est tenu envers le travailleur, a le caractère d’une faute inexcusable lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était soumis le travailleur et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver.
Cour de cassation, 2ème chambre civile, 29 février 2024, pourvoi n° 22-18.868